Charles Prosper l’étudiant – 1895

École des Beaux-Arts de Paris (source Wikipédia)

Je vous propose aujourd’hui un double RDVancestral entre deux étudiants au Beaux-Arts…

J’avais 20 ans, j’étais venue passer une semaine à Paris faire des recherches pour un projet aux Beaux-Arts de Nancy où j’étais étudiante. C’est en passant rue Bonaparte devant  le bâtiment de l’école des Beaux-arts de Paris que je m’étais sentie comme aspirée par le temps… 1977…1952…1924…1908…1895

Je me suis retrouvée, avant même d’avoir réalisé ce qu’il m’arrivait, juste derrière un photographe. Il était immobile derrière son trépied, la tête sous un tissu noir, il tentait d’assagir une bande de jeunes étudiants qui posait dans la salle de dessin.

Ma présence était forcément incongrue, les seules personnes de la gente féminine que l’on pouvait rencontrer ici étaient les modèles car les femmes ne pourraient s’inscrire dans l’école que l’année suivante en 1896.

Parmi ces jeunes hommes, l’un d’eux me fixe, il plonge ses yeux dans les miens » Je lui ai tout de suite reconnu un air de famille, bien sûr! c’est Charles Prosper Ancelet, le futur père de Madeleine.

C’est un très beau jeune homme, grand, une fine moustache souligne sa bouche. Charles est un charmeur qui aime séduire les jolies femmes, d’ailleurs cette réputation le suivra toute sa vie… Il est le fils d’un architecte connu Gabriel Auguste Ancelet, petit neveu de Victor Hugo. Charles est assez sûr de lui et profite de la vie. Il aime se promener dans les rues de Paris à vélo et a toujours un œil sur les jolies filles.

L’ambiance de l’atelier est très potache. Je propose mon aide au photographe pour l’aider à porter son matériel, je me ferais ainsi moins remarquer… Il a été chargé de faire un reportage  sur les élèves de l’atelier de Mr Scellier de Gisors, toujours prêts à plaisanter. Charles en fait justement partie. Je retrouve la bande de joyeux drilles dans une autre salle. Ils ont soudain l’air sérieux, alors qu’ils viennent de finir une sorte de statue à tête de cochon affublée du chapeau et de la pipe de leur professeur… Charles, premier de la rangée, reste élégant, il a gardé sa lavallière sous sa blouse.

Le photographe recharge une plaque dans son boitier, puis continue son reportage. Il a demandé aux élèves de le rejoindre dans la salle de présentation des travaux. Au mur, un magnifique plan est en exposition, deux professeurs en costume  fument leurs cigarettes, alors qu’entrent quelques élèves dont Charles qui s’est affublé du chapeau du cochon tout en gardant un grand sérieux. Une fois la photo prise, il s’approche de moi:

« Bonjour, ne vous ai-je pas déjà rencontrée? » je souris « Il y a bien peu de chance… »

Marie Leclerc

Il reprend: « vous me faites penser, à l’un des modèles, vous la connaissez peut-être, elle s’appelle Marie Leclerc »

« Oui on me l’a déjà dit… mais au siècle prochain! ».  Cette fois je ne peux plus me dérober, je lui explique que je suis l’une des ses arrières-petites filles et que je suis également étudiante aux Beaux-Arts. Il est étonné mais semble me croire. J’en profite pour lui poser une question:

 » Pourquoi avez vous choisi de faire les Beaux-arts? »

« Je ne savais pas trop quoi faire alors j’ai suivi les traces de mon père qui était architecte. Il a travaillé pour Napoléon III, et il m’a encouragé à suivre cette voie, mais il ne pourra plus guère me conseiller. Il est décédé il y a 6 mois, un an et demi après ma mère. » Un voile de tristesse passe dans ses yeux. « C’est mon frère ainé Gabriel qui est médecin, qui maintenant me pousse à devenir architecte ».

 

Il remet sa veste, réajuste sa lavallière, « Je dois vous laisser, je dois présenter l’un de mes travaux. Ravi de vous avoir rencontrée, vous reverrais-je un jour? » Je ne peux que lui répondre que je ne sais pas. Il est décédé un peu plus d’un an avant ma naissance.

Je reprends ma place auprès du photographe pour l’observer en train de défendre son projet. Il est soudain bien sérieux et concentré.

Il obtiendra son diplôme d’architecte en 1900. Parmi ses constructions un immeuble 19 avenue Théophile Gauthier à Paris où sont nées ses filles et où il avait installé son cabinet d’architecture.

Cet article a été rédigé dans le cadre du #RDVAncestral, un projet d’écriture, ouvert à tous, qui mêle littérature et généalogie. En savoir plus.

Retrouvez Charles Prosper Ancelet dans mon arbre généalogique

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